Les premiers liens affectifs que nous formons dès la naissance sont déterminants pour notre développement. Depuis plusieurs décennies, la majorité des spécialistes en psychologie et neurosciences s’accordent à dire que l’attachement joue un rôle essentiel dans la construction de la personnalité et du bien-être des individus. Mais c’est quoi exactement l’attachement ?
C’est quoi « l’attachement » ?
Quand on dit « attachement » on pense au sentiment d’affection qu’on peut ressentir pour quelqu’un. Or, en psychologie, l’attachement c’est bien plus que ça.
La théorie de l’attachement, développée par le psychiatre britannique John Bowlby
dans les années 1950, met en évidence l’importance du lien affectif entre un enfant et sa figure
d’attachement principale, généralement un parent. Depuis, cette théorie a été étudiée par de très nombreux chercheurs à travers le monde et validée par les neurosciences.
Cette théorie repose sur l’idée que le besoin de s’attacher à une figure protectrice est inné et essentiel à la survie du bébé. L’attachement ça n’est pas que de l’amour ou de l’affection, c’est aussi et avant tout le fait que l’adulte soit disponible pour répondre aux besoins vitaux du bébé.
Les comportements d’attachement
L’attachement est génétiquement programmé et vise la protection et la survie du bébé.
Observons de plus près un bébé : contrairement à la plupart des mammifères, le petit humain ne sait pas répondre à ses besoins seul. Un poulain ou un veau se met rapidement sur ses pattes pour aller téter. Le petit humain ne sait pas faire ça. Il est totalement dépendant des adultes qui l’entourent pour se nourrir, être propre, se sentir en sécurité. Lorsqu’il a un besoin physiologique, d’affection ou de sécurité, il se manifeste par divers comportements innés et qui évoluent en fonction de l’âge : succion, agrippement, petits cris, chercher du regard, pleurs, cris, vocalises, sourires, et, plus tard, la marche. Ces comportement ont pour unique but de chercher la proximité de sa figure d’attachement afin qu’elle réponde à ses besoins vitaux.

Regardons ce schéma de plus près :
Si sa figure d’attachement répond de manière adaptée, prévisible et fiable, le bébé s’apaise.
Et ça ne s’arrête pas là ! Le bébé va construire des croyances positives :
• sur lui-même « je suis digne d’être aimé », « je suis important », « j’ai de la valeur »
• et sur le monde « le monde est un endroit sécure », « je peux avoir confiance », « j’ai le droit d’avoir des besoins », « je peux demander de l’aide ».
C’est comme ça que l’enfant développe un style d’attachement « sécure ».
Mais si la figure d’attachement ne répond pas de manière adaptée, fiable et prévisible, que se passe-t-il pour l’enfant ? Et bien il construira des croyances négatives :
• sur lui-même : « je ne suis pas digne d’être aimé », « je ne suis pas important », j’ai honte d’avoir des besoins, c’est moi qui ne suis pas normal »
• et sur le monde « le monde n’est pas sécure », « je ne peux compter sur personne »
C’est comme cela que l’enfant développe un style d’attachement « insécure ».
Quand le bébé pleure et que ses figures d’attachement ne viennent pas, il passe par ces émotions :

La seule façon qu’il a d’échapper à ce désespoir, c’est de donner du sens « je ne devrai pas avoir ce besoin ». Et il a honte d’avoir ce besoin. C’est ainsi que se développe la honte toxique qui peut nous suivre toute notre vie : cette impression ne pas être assez, d’être trop, d’être indigne, que nos besoins sont moins importants que ceux des autres….
Les avancées en imagerie cérébrale ont révélé que l’attachement est soutenu par un réseau complexe impliquant plusieurs régions du cerveau, notamment l’amygdale (système d’alarme), le cortex préfrontal (prise de décision et régulation émotionnelle) et le striatum (plaisir et motivation). Ces structures sont activées lors des interactions affectives et jouent un rôle clé dans la construction des liens sociaux.
Des études ont également montré que le stress et le manque d’attachement dans l’enfance peuvent altérer durablement le développement du cerveau, notamment en modifiant la production de cortisol, l’hormone du stress. Un excès de cortisol dû à un attachement insécurisant ou à une négligence peut avoir des effets négatifs sur la maturation neuronale et la capacité à gérer les émotions à l’âge adulte. Lire l’article sur les traumas d’enfance et l’impact de l’attachement sur notre état (anxiété, dépression, maladies chroniques).
A ce moment de l’article, je sais que tout lecteur ayant un ou des enfant() sent la panique monter en se disant « Mon Dieu, j’ai laissé pleurer mon bébé, je l’ai abîmé ». Relativisons. Il y a des effets délétères quand cela se répète souvent. Avoir laissé pleurer son bébé 5 mn de temps en temps parce qu’on prenait une douche n’aura pas cet effet.
Le bébé peut être en détresse si sa figure ne vient pas rapidement, mais cette « rupture d’attachement » se répare très vite quand il a un attachement sécure.
Mais il est vrai que les vieilles méthodes de type « laisse le pleurer ça va lui faire les poumons » ou « ne le prends pas trop dans tes bras, tu vas le rendre capricieux » sont aujourd’hui remises en cause par la théorie de l’attachement et les neurosciences. Nous qui avons été élevés avec ces croyances, sommes nombreux à avoir des attachements insécures. Heureusement, les choses changent.
L’impact de l’attachement sur notre vie d’adulte
Notre style d’attachement a une grande influence sur le le développement de la personnalité et sur notre vie d’adulte. Il va conditionner notre manière de voir le monde, de considérer les autres, de maintenir (ou non) des relations mais aussi notre manière de nous considérer nous-même.
Avoir un attachement sécure permet donc de :
- Assurer sa survie (surtout pour le bébé)
- Avoir une bonne sécurité intérieure
- Pouvoir faire confiance tout en sachant se protéger le cas échéant
- Avoir une bonne estime de soi
- Savoir réguler ses émotions
- développer des compétences sociales positives
- développer son empathie
- Construire son identité sur des croyances positives

Dans la 2è partie de cet article, je vous parlerai des styles d’attachement et de leur impact sur notre vie.